Vladimir Poutine a tenu le 19 décembre dernier sa conférence de presse annuelle (1) devant un large fond beige-orangé, duquel en marron se détachait la Fédération de Russie, au lieu du bleu habituel. Cette innovation n’a suscité aucun commentaire dans la presse, mais l’on pouvait se demander si la symbolique n’était pas annonciatrice de changements. Pourtant, nulle annonce dans ce sens au cours d’un exercice qui est allé son train ronronnant, si ce n’est l’aveu qui devient toujours plus évident du principal échec de la précédente et troisième présidence Poutine, qui pourrait bien être confirmé par l’actuelle, commencée voici déjà deux années. En effet, alors que jusqu’à présent il commençait toujours par donner les chiffres de l’année écoulée, ce jour-là Poutine est passé directement aux questions des journalistes. Il est vrai qu’il n’a pas de quoi se réjouir : la croissance et les investissements ne sont pas au rendez-vous, les salaires sont en berne, et les fameux oukases de mai 2018 ne sont pas près d’être remplis, comme cela a été déjà le cas de ceux de mai 2012. Pourtant, un ton nouveau a été donné à l’exercice habituel par des questions plus politiques, posées d’une voix parfois mal assurée par de toutes jeunes femmes, tant il est vrai que la liberté de parole reste encore très inhibée en Fédération de Russie.
La jeune Ksenia Golovanova de l’agence indépendante Interfax est revenue sur l’affaire Golounov (2), qui a mobilisé la jeunesse russe en juin dernier, avant les grandes manifestations de l’été contre le blocage des candidatures de l’opposition à la Douma de Moscou. L’enquête est menée confidentiellement selon le principe : “on ne donne pas les siens”, ira-t-elle jusqu’au bout et ne conviendrait-il pas de “nettoyer” les services de répression ? a-t-elle demandé. Avant de donner toutes les garanties sur le premier point, Poutine déclare alors : “J’ai commencé mes activités professionnelles dans les organes de sécurité. Le jour où j’ai pris mes fonctions, il y avait là encore des anciens des services : certains d’entre eux se sont sauvés vers les bureaux dès qu’ils ont vu entrer un petit vieux. Qui était-ce ? Il était déjà là dans les années 1936-1937. Qu’est-ce qu’il faisait ? Justement il y avait alors des “nettoyages”, notamment dans les services de sécurité. Le matin quelqu’un venait au travail, ne soupçonnant rien, ne sachant rien, on lui intentait un procès, et le soir même on rendait le corps du fusillé à la famille. Ce petit vieux que tout le monde fuyait, et bien il était chargé de l’exécution des procès”. Cette image glaçante, qui terrorise encore les officiers du KGB en ce début des années soixante-dix, soit trente-cinq ans après ce que l’on a nommé “la grande terreur”, en dit long sur le capital de terreur qui rôde encore dans la société et les consciences en Fédération de Russie.
Et Poutine de conclure : “Donc en ce qui concerne les ‘nettoyages’, on a déjà connu ça, ça a eu lieu dans un passé encore pas si lointain à ce qu’il paraît, et il vaut mieux ne pas s’y remettre”. En tout cas ce petit vieux, comme nombre de bourreaux de la période bolchévico-stalinienne, tout comme les responsables à différents niveaux de la chaîne criminelle totalitaire, ont pu continuer à infester la société en toute impunité. Et Poutine oublie de dire, que de mémoire de Pétersbourgeois, de l’immeuble du KGB à Leningrad où il fait son entrée au début des années soixante-dix, sur la perspective Liteyny descendant vers la Neva toute proche, des flots de sang s’écoulaient chaque matin des années de “grande terreur”, qui n’était pas “notamment” celui des services de sécurité.
La jeune Elena Glouchakova, de l’agence gouvernementale Ria Novosti, lui pose alors une question que tout le monde a sur les lèvres en Russie, celle d’une nouvelle constitution, qui lui permettrait de rester au pouvoir après 2024. Poutine admet la possibilité de supprimer le subterfuge – “pas plus de deux mandats de suite” redeviendrait “pas plus de deux mandats” – ajouté à l’époque au texte de la constitution de 1993, qui lui a permis de se représenter pour deux autres mandats consécutifs en 2012, ainsi que celle d’une réforme constitutionnelle attribuant plus de pouvoir au parlement, “afin de répondre au souhait des partis parlementaires”. La jeune journaliste lui avait cependant demandé “s’il estimait que chez nous en Russie il y a une concurrence politique”. Question qu’il balaye d’un “chez nous sont enregistrés cinquante partis, ce qui est dans la norme, douze d’entre eux existent au niveau fédéral. J’estime que ça correspond aux exigences relatives à la concurrence politique”. Cette question, sans doute bien informée, allait trouver des prolongements dans l’allocution récente du président Poutine à l’Assemblée fédérale le 15 janvier.
Mais avant d’en venir là, revenons à la conférence de presse du 19 décembre : actualité oblige, la prochaine célébration du soixante-quinzième anniversaire de la victoire, a suscité de nombreuses questions, de politique internationale cette fois-ci. La jeune journaliste du média de la CEI “Mir”, Elina Douchkaeva, lui demande “s’il ne regrette pas que dans le défilé de la victoire il n’y ait pas de représentants de toutes les anciennes républiques d’URSS, notamment d’Ukraine et de Géorgie”. Poutine commence par dire qu’il “regrette qu’il n’y ait plus d’URSS”, sans préciser, pour reprendre son adage, s’il parle avec son coeur tout en oubliant sa tête. Il rappelle cependant que le projet de l’Allemagne nazie était “d’utiliser une partie de la population slave pour le travail, une grande partie au-delà de l’Oural, dans les territoires du nord. A quelle fin ? L’extinction. Il n’était donc pas simplement question de conserver l’Etat, mais de conserver l’etnos des slaves de l’est – les Russes et aussi les Ukrainiens”. Pour n’être pas d’anciennes républiques d’URSS, faisons lui remarquer que les Slaves du centre de l’Europe comme ceux du sud, n’ont pas fait l’objet d’un meilleur traitement de la part des nazis que ceux de l’est, et que toutes les anciennes républiques soviétiques n’étaient pas “slaves”. Et que les seuls groupes ethniques à avoir été véritablement et totalement condamnés à l’extinction sont les Juifs et les Tsiganes.
Cette confusion lorsqu’il aborde les sujets historiques sensibles, il en fait à nouveau preuve dans sa réponse à la question qui va déclencher la polémique, posée par la jeune journaliste de la Rossiskaïa Gazeta, Kira Latoukhina : “en septembre de cette année, faisant coïncider cela avec l’anniversaire du début de la seconde guerre mondiale, le parlement européen a pris une résolution qui assimile le nazisme et le fascisme au régime soviétique. Ils nomment cela le totalitarisme, et proposent une nouvelle fête internationale le 25 mai, célébrant les héros de la lutte contre le totalitarisme, qu’en pensez-vous ?” Observons que la question de la journaliste prête elle-même à confusion : la résolution votée par le parlement européen (3) n’assimile pas nazisme et communisme, elle dénonce les crimes des régimes et des idéologies totalitaires, au pluriel. Observons cependant également que ni la résolution votée par le Parlement européen, elle même confuse dans ses formulations – ce qui laisse supposer des tractation entre tendances en son sein – ni Poutine dans sa réponse, ne donnent de définition du totalitarisme (4). Ce dernier commence en effet, si c’est dans une formulation ambiguë, par donner en partie raison à la résolution. Car contrairement à d’autres responsables de la Fédération de Russie (5), en cela négationnistes, pour lui le stalinisme est un totalitarisme : “Le totalitarisme, il n’y a rien de bon là-dedans, ça doit être condamné, sans aucun doute. Je connais la résolution du parlement européen, je l’estime absolument inadmissible et incorrecte, parce que l’on peut indifféremment livrer en gros à l’anathème aussi bien le stalinisme que le totalitarisme, et c’est quelque-chose qui mérite des reproches, sans aucun doute. Notre peuple a été la première victime de ce totalitarisme. Nous l’avons condamné, ainsi que le culte de la personnalité”.
Poutine fait-il référence au XXème congrès du PCUS ? Car où le stalinisme a-t-il été “condamné”, précisément pour tous ses crimes, en Fédération de Russie ? Rappelons que Boris Eltsine a voulu intenter un procès au parti communiste d’Union soviétique au début des années 90, qui n’a pas eu lieu. Et selon Poutine, seule la période stalinienne serait considérée comme totalitaire, à l’exclusion de la période bolchévico-léniniste, qui l’est tout autant. Emboîtant le pas à la jeune journaliste, il s’exclame alors : “mais assimiler l’Union soviétique ou mettre sur un même plan l’Union soviétique et l’Allemagne nazie – c’est le comble du cynisme, ça veut dire que ces gens ne connaissent pas l’histoire, ils ne savent ni lire ni écrire. Qu’ils lisent donc un peu les documents de cette époque, qu’ils regardent comment en 1938 a été signé le soi-disant accord de Munich, comme on dit, quand les leaders des principaux pays – la France et la Grande-Bretagne – ont signé avec Hitler un accord conduisant à la partition de la Tchécoslovaquie”. Et Poutine de poursuivre en reprenant la version soviétique du déclenchement de la seconde guerre mondiale, datant selon lui de ces accords, et plus en amont la version soviétique de l’évolution des relations internationales à partir du Congrès de Versailles. Oubliant au passage ce qu’il a énoncé en préambule, à savoir que le stalinisme, et donc l’URSS qui en était le produit, était un totalitarisme, ce qui n’était pas sans conséquences dans les relations que les Etats démocratiques entretenaient avec elle. Etats démocratiques qui, plutôt que de prendre à bras le corps le développement de l’un comme de l’autre Etat totalitaire en Europe, portent également une lourde part de responsabilité dans le développement ultérieur des événements.
Poutine promet alors d’écrire un article sur cette histoire : “je le publierai sans faute, parce que j’ai demandé à mes collègues de me ramasser des matériaux dans les archives”. L’on suppose qu’il s’agit de “collègues” historiens, en espérant qu’ils ne soient pas tous de la vielle école soviétique, comme le quarteron de ceux qui sont intervenus à l’émission du grand maître du consortium Rossia Segodnia, Dimitri Kisselev, qui dirige toutes les antennes de RT et de Spoutnik de par le monde. Le 12 janvier dernier, l’on a eu en effet droit de sa part à un véritable quart d’heure de propagande soviétique du plus mauvais aloi, sur la “libération” de Varsovie par l’Armée rouge en janvier 1945, dont tout le monde sait maintenant qu’elle avait patienté de l’autre côté de la Vistule, en attendant que la Wehrmacht – qui avait dans un premier temps fait retrait à son approche – ne massacre la résistance polonaise et ne détruise Varsovie d’août à octobre 1944, afin que l’URSS puisse prendre possession de la ville sans opposition pour y installer son régime tout en entreprenant à son tour une répression féroce. Ce n’est pas ainsi que les relations russo-polonaises vont s’améliorer, même si le gouvernement souverainiste-nationaliste actuel du PiS, “Droit et Justice”, porte une part de responsabilité dans leur dégradation, en n’invitant pas le président Poutine à la commémoration du début de la seconde guerre mondiale en septembre 2019.
La façon dont il a répondu à cette gifle, en mettant en cause la Pologne dans le déroulement de la seconde guerre mondiale, a conduit le président polonais Andrezj Duda à renoncer à participer à la commémoration qui a lieu à Jérusalem le 23 janvier, en mémoire de la libération d’Auschwitz voici soixante-quinze ans. Laquelle aurait donc pu avoir lieu six mois auparavant, sauvant ainsi un nombre important de vies, si les motivations de Staline n’avaient pas été autres que la seule “libération” de la Pologne. En contrepartie le président Poutine n’a pas non plus été invité à la commémoration qui doit avoir lieu à Auschwitz même. L’ancien président Lech Walesa, représentant de l’aile libérale du champ politique polonais, s’est dit cependant prêt à remplacer le président Duda à Jérusalem, dans une récente interview accordée au site Onet Wiadomosci (6). Très critique à l’égard de l’équipe actuelle au pouvoir, il est partisan d’une recherche commune, avec le président Poutine, “des fondements sur lesquels établir une nouvelle vision de l’Europe”.
Le président Duda a cependant tenu à préciser la raison de son refus de participation : “je ne vois pas la raison pour laquelle les présidents de Russie, d’Allemagne, de France, les représentants de Grande-Bretagne et des USA pourraient prendre la parole en un tel lieu et en relation avec une telle commémoration, et pas le président de la République polonaise, surtout dans la situation actuelle, lorsque du côté russe, et en particulier du côté du président russe Vladimir Poutine, surgissent des accusations à l’égard de la Pologne, qui sont tout à fait contraires à la vérité historique et qui sont au service d’une tentative de nous rabaisser en tant que société et d’une falsification de l’histoire”. La raison de cette interdiction de parole est donnée à Onet Wiadomosci par Johnny Daniels, président de la fondation “From the Depths” consacrée au dialogue polono-juif : “la célébration du 75ème anniversaire de la libération d’Auschwitz en Israël est financée par un oligarque russe, Wiaczeslaw Mosze Kantor”.
Lors de son allocution annuelle devant l’Assemblée fédérale le 18 janvier (7), qui cette année a eu lieu plus tôt que prévu remarque le rédacteur en chef de la Komsomolskaïa Pravda, Vladimir Sougorkine (8), Poutine a semblé vouloir mettre un frein à la querelle par l’annonce de la création d’un “complexe le plus grand et le plus complet de documents d’archives, de films et de photos sur la deuxième guerre mondiale, accessibles à nos citoyens comme au reste du monde”. C’est une bonne chose, mais attendons de voir si toutes les archives seront ouvertes : celles du gouvernement soviétique, comme celles du PCUS et celles des différents services secrets. Ce serait d’ailleurs l’occasion de rendre le reste des archives françaises volées par les nazis et recélées ensuite par l’Union soviétique. <br> Mais la majeure partie du discours présidentiel a été consacrée à un nouveau programme volontariste, consistant en une série de mesures sociales ainsi qu’en une réforme de la constitution en prévision de son prochain départ de la présidence de la Fédération de Russie en 2024.
Une bonne partie de ces mesures concernent la démographie et la politique familiale, éléments d’une politique nataliste de puissance, alors que la Fédération de Russie se trouve dans le creux démographique dû à la forte baisse de natalité des années 90, ainsi qu’au nerf de la guerre : l’augmentation du “capital maternel”, l’allocation donnée aux mères dès le premier enfant et allant en augmentant en fonction des naissances ultérieures. Se félicitant de la stabilité budgétaire du pays et du bas niveau d’inflation, il envisage une augmentation des salaires de l’ensemble des citoyens, ce qui permettrait selon lui à la Russie d’atteindre en 2021 un niveau de croissance supérieur à celui du reste du monde. Pour cela il envisage également une forte croissance de l’investissement, en utilisant le fonds de réserve, mesure que les libéraux lui recommandaient depuis nombre d’années. Se targuant que la Fédération de Russie se trouve à l’avant-garde en matière de dissuasion avec la nouvelle panoplie hypersonique non-balistique, Poutine veut mettre à profit l’isolationnisme qu’elle permet pour réaliser les réformes constitutionnelles auxquelles il consacre la fin de son allocution.
Tout en affirmant la nécessité du maintien de la constitution de 1993, adoptée sous la présidence Eltsine, il propose des modifications qui pourraient être soumises à referendum : notamment un meilleur équilibre des pouvoirs au profit de la Douma, qui se verrait confier la formation du gouvernement et la nomination du premier ministre, sur laquelle le président ne pourrait revenir, et au profit du Conseil de la fédération, la Chambre haute ou sénat, rassemblant les gouverneurs et les responsables régionaux, qui nommerait dorénavant les procureurs locaux, de manière à faire reculer le pouvoir des mafias locales. Ces changements annoncés pourraient constituer une nouvelle révolution par le haut en Russie, et l’évolution de la Fédération vers une République parlementaire. Cependant l’actuelle Douma est constituée de représentants du parti gouvernemental Russie unie, et des trois partis qui n’ont d’opposition que le nom, participant de fait à la coalition gouvernementale : le KPRF des communistes, la Russie juste des sociaux-démocrates et la très nationaliste LDPR du libéral-démocrate Jirinowski.
Immédiatement après, Dimitri Medvedev a annoncé la démission de son gouvernement et la sienne, remplacé par un technocrate, promoteur d’une réforme des impôts considérée comme un exploit du genre, Mikhail Mishustin. Medvedev paierait ainsi l’échec annoncé des nouveaux oukases de mai, ainsi que le parfum de scandale autour de ses fastueuses propriétés, y compris à l’étranger, révélées par le Fonds de lutte contre la corruption du blogueur et opposant Alexeï Navalny (9). Poutine, fidèle aux hommes de son clan, l’a aussitôt nommé vice-président du Conseil de sécurité, un poste spécialement créé pour lui. Selon Sougorkine, les mesures institutionnelles annoncées par Poutine, laissent prévoir des élections anticipées, aussi bien législatives que présidentielles. Poutine ne voudrait en effet pas connaître une fin de règne marquée par la stagnation, il choisirait donc de quitter plus tôt la présidence, ces mesures lui réservant un levier de pouvoir par le contrôle de la Douma avec Russie unie, face à un président qui lui verrait le sien réduit, et serait donc également mieux contrôlable.
Ces changements pourraient voir évoluer la Fédération de Russie dans le bon sens, sur les plans économique et institutionnel. Mais il faudrait pour cela que sa politique mémorielle évolue également, comme le recommande le dernier paragraphe de la résolution du Parlement européen – avec lequel Poutine est en partie d’accord, comme il l’a déclaré lors de sa conférence de presse – : “Le Parlement a réitéré que la Russie reste la plus grande victime du totalitarisme communiste et que sa transformation en un Etat démocratique sera entravée aussi longtemps que le gouvernement, l’élite politique et la propagande politique continueront de blanchir les crimes communistes et de glorifier le régime totalitaire soviétique. Il a invité par conséquent la société russe à accepter son passé tragique”. C’est à dire à devenir un pays comme un autre.
Frédéric Saillot, le 20 janvier 2020.
(1) http://kremlin.ru/events/president/news/62366
(2) Voir mon article : http://www.eurasiexpress.fr/presse-et-democratie-en-eurasie
(3) https://oeil.secure.europarl.europa.eu/oeil/popups/printficheglobal.pdf?id=705769&l=fr
(4) Voir à ce sujet mon livre, “Katyn”, L’Harmattan, 2010, pp 248 à 259.<br>
(5) Par exemple récemment le sénateur – twitteur Alexeï Pouchkov : https://www.youtube.com/watch?v=d2FGY2M1_a4
(6) https://wiadomosci.onet.pl/tylko-w-onecie/obchody-75-rocznicy-wyzwolenia-auschwitz-lech-walesa-komentuje/jwl36lk.amp
(7) http://kremlin.ru/events/president/news/62582
(8) https://www.kp.ru/daily/27080.7/4150921/
(9) https://www.youtube.com/watch?v=qrwlk7_GF9g