Après celle qui a ravagé l’Europe et le monde au XXème siècle, opposant le communisme aux démocraties, voici qu’est apparue une nouvelle forme de guerre civile internationale : celle qui oppose le globalisme post-démocratique, voire même post-humaniste, aux nations. La première est allée jusqu’à la guerre totale entre les deux totalitarismes nazi et communiste au moment où, en juillet 1941, Staline, en désespoir de cause et pour éviter la débacle, ne se décide à rendre au peuple russe ses valeurs traditionnelles, au nom desquelles il a puisé l’énergie pour défendre la patrie en danger, en alliance avec les démocraties. Dès lors le communisme ainsi bridé, dans le cadre d’une guerre froide figée par l’équibre de la terreur, allait bientôt se résoudre dans le XXème congrès du PCUS en 1956, avant que la Perestroïka puis le putsch de Eltsine ne l’achèvent définitivement. La seconde guerre civile internationale surgit alors du champ laissé libre à la “démocratie” et au “libre marché” d’imposer la domination universelle des puissances qui en sont les maîtres, à commencer par les Etats-Unis, utilisant pour cela le soft-power des “révolution de couleur” et la guerre hybride, mais aussi les moyens de la guerre classique, du coup d’Etat et la destruction de sociétés entières.
Ces deux guerres civiles internationales ont eu et ont une dimension internationale et une dimension nationale, qui se combinent. La première avait opposé l’URSS aux démocraties, déterminant des champs d’affrontement dans le tiers-monde et à l’intérieur des nations entre partis communistes et forces nationales. La seconde oppose le bloc occidental mené par les Etats-Unis, dans une volonté de domination unipolaire, à un bloc mené par la Russie et la Chine, partisans d’un monde multipolaire dans le cadre du respect de la souveraineté des Etats et de la légalité internationale. Cette opposition se traduit par une rivalité des deux blocs dans les régions stratégiques du Moyen-Orient et de l’Asie centrale, mais aussi par l’opposition à l’intérieur des nations entre globalistes post-nationaux, post-démocrates, voire même post-humanistes, et patriotes attachés à la souveraineté de la nation et aux valeurs qui fondent les civilisations humaines.
Deux événements ont bouleversé la donne de cette nouvelle guerre civile internationale l’an dernier, serrant un cran supplémentaire dans les tensions internationales et intra-nationales. Le premier, le Brexit, a donné le coup de grâce à une Union européenne croulant sous les coups de boutoir de l’échec structurel de l’euro, de la dislocation de l’Ukraine, conséquence de l’hubris européiste, et du déferlement de la vague migratoire provoquée par la politique folle des Occidentaux au Moyen-Orient et en Afrique. Le second, l’élection de Donald Trump aux Etats-Unis, a constitué une véritable inversion des pôles, privant les globalistes de leur référence majeure états-unienne. Il n’était que de voir l’hystérie des clones de l’industrie médiatique pendant la campagne américaine pour s’en rendre compte, s’accompagnant de manipulations et de mensonges ahurissants, comme de l’opération sous faux drapeau d’une immixtion de hackers russes dans l’élection, vraisemblablement réalisée par des services américains basés à Francfort. Mais une fois Trump élu, les globalistes sont passés à la contre-offensive, l’empêchant de mettre en oeuvre son programme aussi rapidement qu’il le voudrait (1), notamment dans cet événement messianique que serait un rapprochement russo-américain, particulièrement dans l’éradication du terrorisme islamiste, allié des globalistes.
Dans le cadre de cette nouvelle guerre civile internationale, le moindre événement politique national s’inscrit dans cette dimension internationale, a fortiori les élections générales, comme celles qui viennent d’avoir lieu aux Pays-Bas. Les résultats ont été salués par les commentaires enthousiastes et très peu analytiques de l’industrie médiatique, tant la peur est grande que ne se poursuive sur le continent européen le séisme ouvert par le Brexit et l’élection de Trump, considérant la relative défaite du parti au pouvoir, qui a perdu 8 sièges de députés sur 150, comme une victoire historique, et les progrès relatifs du parti de Wilders, qui en a gagné 5, comme une défaite sans appel.
C’est dans ce cadre que se déroule l’élection présidentielle française, ce qui explique ses circonstances inédites, jamais vues dans la politique française jusque-là. Au lieu de discuter des vrais sujets : le déficit de l’Etat, équivalant à son PIB, le chômage, la croissance économique, une immigration massive aggravant le déficit d’intégration de toute une partie de la population immigrée musulmane, l’école, la sécurité, la politique étrangère de la France, depuis bientôt deux mois, la campagne est quotidiennement polluée par les “affaires”, touchant notamment les deux candidats qui devaient logiquement être opposés au second tour, François Fillon et Marine Le Pen. La raison en est que les programmes de ces deux candidats, s’ils s’opposent radicalement sur le plan économique, s’opposent tous les deux sur bien des points aux dogmes de la politique globaliste : ils sont déterminés à lutter résolument contre le terrorisme islamiste, que cette dernière utilise et sponsorise, à soumettre la religion musulmane à la loi française comme l’ont été les religions chrétiennes et juive, à mettre un terme à l’immigration massive et au regroupement familial qui se traduisent par l’extension d’enclaves communautaristes, à reconstruire une école détruite par les “réformes” Haby-Jospin-Allègre, à défendre les valeurs qui fondent notre civilisation que le relativisme et le post-humanisme ellegébêtiste des globalistes contestent, et enfin à promouvoir une politique de rapprochement et de coopération avec la Russie. Tout cela fait d’eux une femme et un homme à abattre, dans un lynchage médiatique auquel le Front national est accoutumé, beaucoup moins François Fillon.
Homme du système, ayant parcouru toutes les avenues de ce système, il est probable qu’il ait fini par en déceler les tares et qu’il en ait tiré la détermination à le réformer voire à le changer. Homme du système, il voudrait faire rupture avec ce système, notamment sur tous les points évoqués précédemment. Ce que le système ne lui pardonne pas. A quoi, moins rôdé qu’une Marine Le Pen au caractère néo-totalitaire de ce système, il ne s’attendait probablement pas, et à quoi il n’était visiblement pas préparé. Comme tous les enfants gâtés de ce système, il en a profité, d’emplois bien rémunérés, fictifs ou pas, en somptueux cadeaux, qui ressemblent fort à une corruption que le chrétien qu’il dit être devrait reconnaître pour ce qu’elle est. Comme le remarquait Vladimir Jirinowski, politique russe très décrié en Occident, mais qui participe quotidiennement aux talk-shows de la télévision russe, la façon dont Fillon a été marqué à la culotte par une surveillance inquisitoriale, alimentant la diffusion savamment programmée de ses méfaits pour achever de le discréditer, ressemble en tous points aux méthodes utilisées en son temps par le KGB, auxquelles d’ailleurs le FSB ne renonce pas toujours.
A qui profite le crime ? Le coup viendrait de l’Elysée, via un jeune conseiller très assidu, Gaspard Gantzer (2), un ami de Macron. Hollande l’aurait chargé de remettre au Canard enchaîné un dossier concocté par Thomas Cazenave, nouveau secrétaire général adjoint de l’Elysée, camarade de promotion de Macron à l’ENA, au moment où il était son directeur de cabinet au ministère des Finances. Autant dire sous la responsabilité directe de Macron lui-même. Le bénéfice de l’opération revient donc bien évidemment à ce dernier, lui dont le programme satisfait les instances globalistes tant il ne touche ni à l’Union européenne dirigée par l’Allemagne, ni à l’euro, ni à l’OTAN, ni à l’islam, auquel il donnerait probablement la possibilité, s’il était élu, d’installer des segments de loi islamique dans la société française, par un autofinancement de la taxe hallal. Ce dont il a été fortement question en cette fin de mandat avec la création d’une “Association musulmane pour un islam français”, et qui a été repris par Juppé et son égérie Kosciusko-Morizet.
Enfant chéri du système, Macron a été “young leader” de la “French-American foundation” en 2012. Formé à la banque Rotschild, il a été le protégé d’Henry Harmand, ancien physicien devenu grossiste et milliardaire de gauche, et lancé par Attali, Jouyet et Minc. Bien que possédant autant de casseroles au train que Fillon et Le Pen réunis, gageons que le parquet, en toute indépendance, se limitera à ouvrir une enquête pour favoritisme concernant une soirée réunissant 500 entrepreneurs français à Las Vegas le 6 janvier 2016, organisée par “Business France”, organisme de promotion de la “French Tech” dépendant de Bercy, alors que Macron était toujours ministre de l’économie, l’intendance ayant été confiée sans appel d’offres à l’agence Havas.
Le débat Fillon – Le Pen aura-t-il donc lieu, entre la thérapie de choc proposée par Fillon, qui a déclaré, alors qu’il était premier ministre, que la France était un “Etat failli”, et la sortie de l’euro et de l’Union européenne proposée par le Front national ? Fillon est-il bien placé pour imposer dans les trois mois suivant son élection la suppression de 500 000 emplois dans la fonction publique, celle des 35 heures s’accompagnant de l’allongement de la durée du travail à 65 ans, la réforme du code du travail, la diminution des charges des entreprises comme celle des dépenses de l’Etat, le redémarrage de la croissance pour rééqulibrer la relation franco-allemande et le renforcement de la zone euro par un gouvernement, alors qu’il prône par ailleurs une Europe des nations, lui qui a voté contre Maastricht en 92 ? La vraie thérapie de choc ne serait-elle pas plutôt celle proposée par Marine Le Pen, avec notamment le fait que recouvrer notre souveraineté monétaire permettrait de régler le poids de la dette qui jusqu’à présent ne cesse de s’aggraver avec les emprunts que doit effectuer l’Etat sur les marchés extérieurs ? De tout cela, il n’a pas été question dans un pays qui a pourtant inventé la démocratie, la liberté de la presse et le pluralisme.
Au lendemain des élections régionales de décembre 2015, il était clair que le tripartisme vers lequel semblait s’acheminer la politique française, entre la droite, la gauche et le Front national, s’était mué en bipartisme, sous la pression d’une accélération de la décomposition due à la défaite de décennies d’une même politique menée indifféremment par la droite et la gauche, dictée par le globalisme atlantiste de l’UE. L’on pouvait alors émettre l’hypothèse qu’en conséquence, le premier tour des élections françaises constituerait la primaire des candidats globalistes, opposés à Marine Le Pen, solidement implantée dans les sondages. Etant donnée la décomposition de la gauche, après la défaite éclatante de Hollande, entre un Hamon promoteur d’une utopie délirante avec le revenu universel, tenant qui plus est des propos justifiant la discrimination des femmes dans un café fréquenté par des musulmans à Sevran, pour lesquels de façon surprenante il n’a jusqu’à présent pas été poursuivi, et un Mélenchon qui se croit encore au 19ème siècle, il était clair que ces primaires allaient profiter à la droite. Mais ne voilà-t-il pas que le candidat Fillon, surfant sur la vague de volonté de changement des électeurs, propose un programme de rupture partielle avec ce système et bat aux primaires de la droite un Juppé plus conforme au programme globaliste. Raison pour laquelle les primaires du globalisme ont eu lieu avant, dans une campagne de presse de l’industrie médiatique, soumise au copié-collé du “Jacques-a-dit”, dès le lendemain des primaires de la droite, relayée par l’ensemble de la classe politique. “Un assassinat”, pour reprendre les mots de Fillon, ressemblant fort à un putsch à froid, imposant le candidat Macron.
La France est en effet la cinquième puissance économique mondiale, elle est également puissance nucléaire et membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU avec les Etats-Unis, l’Angleterre, la Russie et la Chine. Que resterait-il aux globalistes, c’est à dire au parti de la guerre, pour imposer la domination unipolaire et néo-totalitaire de leur idéologie sur des sociétés de masse acculturées, si la France venait elle aussi à basculer dans le camp des partisans d’un monde multipolaire, engagé dans la coopération dans le cadre du respect de la souveraineté des Etats, de la législation internationales et des valeurs qui fondent la civilisation humaine ?
Frédéric Saillot, le 19 mars 2017
(1) Voir l’article de Thomas Flichy de La Neuville, “L’Amérique paralysée”, dans la rubrique Articles.
(2) A droite de Hollande sur la photo illustrant l’article sur la page d’accueil, à l’occasion de la conférence “French Tech Ticket” à l’Elysée le 2 mars 2016. Macron, Hollande et Gantzer posent avec les “young leaders” des “start-up” basées à Paris.
Lire également l’article consacré à Gaspard Gantzer le 24 janvier par Libération, soit à la veille du premier article du Canard enchaîné le 25 janvier, qui déclenche le “Pénélope gate” : http://www.liberation.fr/france/2017/01/24/gaspard-gantzer-delivre-des-messages_1543738